Ce n'est pas tous les jours que Niko avait la chance de réparer des modèles de technologies venant du monde humain. Il était davantage habitué de gérer avec les créations semi-magiques d'Everwilde, ou encore d'adapter des ordinateurs ramenés du monde humain et de leur permettre la connexion avec le réseau d'Everwilde. De simples manipulations que toutes personnes seraient capable de faire, il était sans dire qu'il était davantage ingénieur qu'électricien, malgré que le fait inhérent de sa composition lui permettait un grand avantage lorsqu'il était temps de parler d'électroniques. Mais! Cela ne l'empêchait pas d'avoir le doigt magique avec les technologies "non-magiques" également, car au fond, un circuit reste un circuit, c'était uniquement différent un peu. Le fait que ce soit un peu nouveau pour lui ne l'empêchait pas d'avoir une compréhension théorique parfaite dans le milieu.
Enfin, tout pour dire qu'il n'était certes peut-être pas aussi savant qu'un électricien ou encore un technicien formé humain, mais il n'était pas loin!

Pourquoi je parle de ça?
Et bien, tout simplement car c'était un certain de ces ordinateurs qui l'attendait aujourd'hui.

Présentement dans son magasin un peu en pagaille, c'était une occasion très spéciale de voir la pancarte "ouverte" retournée du bon côté sur la devanture de la porte. Il était plus habituel de voir le magasin fermé puisque son propriétaire n'était pas là. Ou encore il était bien là, mais le magasin restait tout de même fermé. Tête en l'air, il arrivait souvent à Niko de travailler sur un projet nuit et jour sans jamais rouvrir le magasin. Éthique peut agréante pour une boutique, je vous l'admet, mais là n'était pas vraiment le but premier du magasin Au Bouleau de Fer. Davantage un établi doublant comme un comptoir qu'une véritable échoppe, ce n'était pas le genre de kiosque où l'on venait s'acheter toute sorte de chose. Non, lorsque l'on venait ici, ce n'était pas pour la marchandise, mais plutôt pour le marchand. Véritable sorcier de la technologie, l'on possédait quelque chose de brisé, on faisait venir Nikolas, car c'était plus simple que de trouver l'emplacement de sa boutique.

Le voici donc attablé à son comptoir, oeil droit remplacé par un oculaire afin de pouvoir zoomer sur son travail, il était complètement absorbé par le petit engin sur lequel il travaillait depuis un bon moment. Ainsi, il n'entendit pas la petite alarme signalant l'arrivé d'un client, pas jusqu'à ce que ce dernier n'énonce, surpris et incrédule :
— Niko?
Relevant la tête face au bruit, il adressa un sourire professionnel à l'individu.
— Allo! Oui c'est bien moi, je peux vous aider?
Aucune commémoration, aucune reconnaissance de la part de Niko face à son vieil ami. C'était tout évident, il avait subit des dommages de la part du Lobo, et n'en était pas sorti indemne. Que ce soit mentalement ou physiquement, car là où son apparence avait autrefois été complètement similaire à un humain, désormais son statut d'Androïde était à la vue de tous : Engrenages au niveau de la tête à l'air libre, traces de soudure descendant de son oeil gauche et disparaissant sous son gilet, bras couverts de lignes mécaniques et un présentement ouvert afin de pouvoir débarrasser de ses mains les quelques outils qu'avait utilisé Niko.

Mais pourtant derrière cet inconnu, on pouvait reconnaitre les boucles chocolats, le sourire mesquin, la petite dent dépassant de sa dentition, l'étincelle dans son regard. Il n'était peut-être pas le Niko de Svane, mais il restait Nikolas.

Contournant le comptoir, il retira l'objectif et replaça son oeil à sa place.
— Ah Niko ! ca fait un bail !
Plissant son oculaire, il laissa son interlocuteur continuer néanmoins,
— T'as bien grandit depuis le temps. Et t'as même ta propre boutique ? C'est cool ça !
Malgré que la personne en face de lui était un complet inconnu —ou du moins, Niko croyait—, un sourire s'éclaircit sur son minois, une vague de fierté d'avoir l'approbation de l'Inconnu le remplissant de joie. C'était curieux comme sentiment, mais Niko n'était pas le genre à se questionner longtemps sur ce genre de truc et il continua la conversation, comme si rien ne s'était déroulé,
— Oui! C'est pas tant une boutique qu'un endroit où je peux travailler, mais ça fait le boulot, penchant la tête sur le côté, il rajouta toutefois, curieux, Mais pourquoi être venu me voir?, il sourit, radieux et inconscient du mal que ses paroles allaient très probablement causer chez le plus vieux, Pas que votre visite ne me réjouit pas! C'est rare que des clients que je ne connais pas soient aussi gentils avec moi!, et ainsi, comme si manifestée par ses paroles, une étincelle secoua le crâne de Niko, lui causant un spasme rapidement oublié.

L'admission de son manque de mémoire ne sembla pas frustrer l'inconnu, alors Niko vit cela comme un bon signe.
— Ah, désolé, j'oublie souvent que je ne suis plus le même qu'à l'époque. C'est moi, Svane. Je sais qu'on a perdu le contact après mon départ catastrophe de l'école et que ça remonte à loin mais ça me fait plaisir de revoir ta trogne.
Nikolas fronça les sourcils face aux dires de ce Svane. Il... Devait... Le reconnaitre...?
— Des connaissances m'ont recommandé cette boutique pour mon matos. Je ne savais pas que c'était toi qui tenait cet endroit mais d'un autre coté, je ne suis pas si surpris que ça. Tu as toujours eut un don avec la technologie.
Ses yeux passant du sac au visage de Svane, puis au sac, puis à Svane. Lui adressant un regard un peu perdu, il se frotta le derrière de la nuque, mal à l'aise.
— Je euh..., il évita de regarder Svane dans les yeux, ses oculaires braqués vers la table et le sac, doigts occupés avec l'ouverture de ce dernier, J'ai aucune mémoire de mon temps avant le quartier du mal..., il écrasa le tissus, J'ai aucune idée de ça remonte à quand mais-, il risqua un regard à Svane, J'ai pas de souvenir de toi. Je suis désolé...
Comment annoncer gentiment à un bon ami que l'on ne se souvient de rien, pas de lui, pas de son passé, pas de son origine, uniquement un long réveil d'un sommeil profond et long, d'un cauchemar continu pendant des années.
Amenant sa main à son bras gauche, il joua, absent, avec un fil dépassant de ce dernier.

En captant le presque soupir, Niko ferma les yeux.
Dire qu'il ne se souvenait de rien serait un mensonge, il le savait.
Mais avouer que les quelques souvenirs vagues qu'il retenait, des sentiments, ou plutôt devrait-il dire, de la perte de sentiments...
Non, dire qu'il ne se souvenait de rien était mieux.
— Oh... It's okay, ne t'excuse pas. C'est à moi de m'excuser plutôt, je débarque comme ça s'en prévenir et je t'ennui avec mes blablas du coup.
Il rouvrit les yeux, surpris de ne sentir aucune colère ou agacement dans la voix d'autrui. Lui adressant un regard stupéfait, il ne se manqua pas de l'assurer que ce n'était pas sa faute, du moins, il le fit avec son expression et son regard.
— Je suppose qu'on a aussi beaucoup changé depuis l'époque où on s'est rencontré, c'est comme si on était de nouvel personne ! Donc on aurait quand même dû repasser par la case "on ne se connait pas, présentons nous ?". Ah! Attend...
Suivant des yeux les mouvements de Svane, il haussa un sourcil sans s'en rendre vraiment compte, incrédule de son changement de position. Tout en fixant la main tendue, il sentit un petit sourire percer les nuages en voyant les manières théâtrales de son "ami".
— Bonjour, vous devez être monsieur Ferro ? Enchanté de faire votre connaissance. Je m'appelle Svane, je viens pour effectuer quelques réparations sur mon ordinateur.
Petit rictus devint sourire éblouissant, il proposa sa propre main, repensa une seconde, ferma le compartiment encore ouvert puis se réessaya, un rire dans la voix,
— Enchanté! C'est bien moi! Nikolas Ferro, à votre service!, il fit signe vers le sac avec un doigt, Je devine que c'est cet ordinateur en question dont il est question?, ouvrant le sac à dos, il retira délicatement l'engin pour le poser sur la table, yeux immédiatement absorbés par la machine, Que semble être le problème?, notant que c'était un modèle du monde humain, Niko sentait déjà l'excitation gonfler : il n'en voyait pas souvent, et c'était donc une curiosité personnelle.

Ignorant les mouvements de l'autre, n'ayant de yeux que pour la beauté sous son regard, une mine déplue s'immisça sur son visage lorsque son ami lui expliqua le problème.
— La batterie a grillé à cause des problèmes de courant de là où je crèche en ce moment et je crois que mon système perso pour pouvoir accéder au réseau d'ici est en train de rendre l'âme aussi.
La batterie et l'adapteur, il était capable de les remplacer sans gros coût, mais quand on avait accès à ni les outils, ni les composants, c'était plutôt difficile.
— Autant dire qu'il me sert à rien actuellement. Mais c'est trop chiant d'aller dans le monde des humains juste pour en racheter un et c'est impossible de trouver du matos de qualité ici.
Laissant sortir un hum continu, Nikolas sorti un fil de son avant-bras gauche :
— Voyons voir ce que tu nous renfermes mon ami...
Se connectant sur le port, il incita la machine à faire un examen de ses composants. Laissant les résultats défiler dans son HUD, il fronça des sourcils, presque impressionné.

Ah oui. La batterie était plus que brûlée, et l'adaptateur était plus que sur le point de rendre l'âme. Comment Svane avait fait pour continuer d'utiliser son ordinateur, il ne le savait point.
— Je sais pas trop c'est quoi le courant chez toi, mais ta batterie est plus que cramée, je crois qu'elle était presque fondue!, dit-il, un air épaté sur le visage. Il projeta les résultats avec le phare dans son oeil, résultats s'affichant en hologramme juste devant Svane, Et ton adaptateur était plus que parti déjà., il fit défiler les mots, Les deux sont remplaçables, donc y'a au moins ça, il cligna des yeux et éteint le projecteur. Souriant, il pointa par-dessus son épaule la porte derrière lui, Et je crois que j'ai les pièces justement dans l'arrière-boutique!
Demi-tour, Nikolas se dirigea en arrière boutique, une main sur son menton, il marmonna,
— Si je retrouve je les ai mis où....
Ainsi il pénétra dans l'arrière-boutique, marmonna sous son souffle. Étagères débordantes de composants, de bibelos et de bibelas, il y avait de tout et de rien, des fils jusqu'aux rouages, de l'électrique au mécanique. Se retrouver dans un tel bordel aurait pris un génie ou une excellente mémoire —et Nikolas ne possédait qu'un de ces deux choses, malheureusement—. Fouillant dans les innombrables tiroirs, sortant outils après circuits, grimpé sur un escabeau, l'inventeur continuait de se souffler des mots, perdu dans sa recherche.
— Non... Pas ici... Oh je savais même pas que j'avais encore ça! .... Ah, c'est la matrix de mon micro-onde! Je me demandais elle était partie où.... Ah! Ahah!
Tenant deux rectangles gris, il sourit à Svane du haut de ses marches,
— Trouvé! Justement les bons modèles et neufs!
Ainsi il alla pour descendre les quelques marches le séparant du sol—
— Ah!
— Et manqua une marche.
Ainsi commença la dégringolade de l'androïde, sur scène dès maintenant.

Ainsi le vol plané de l'androïde mena à l'écrasement grandiose du canard, danse chorégraphiée et mis en scène par : la Gravité.

B A M
Corps coussiné uniquement par la chair molle du canard attendri sous lui, Niko fixait le plafond de sa boutique, expression figée dans un sentiment de surprise.
Puis vint le grognement et la remarque de Svane,
— Ouch...  Je crois que je viens de me péter une côte... Et toi rien de cassé ?
Situation hilare et totalement ridicule, un ricanement émergea progressivement de la gorge de Niko, petit rire se transformant en grande bouffée d'air imparable. Rapidement réduit à un homme de 28 ans incapable de mettre une pause à son hilarité, se tenant le ventre, il roula aux côtés de Svane. Bruits d'amusement sortant de ses cordes vocales corrompus, prenant des répétitions et des réverbérations, présages des dégâts passés à sa forme.
— Eh-eh-e-e-e-eh-eh-eh-eeeh-eh, reprenant son souffle métaphorique, il calme sa pompe interne quelques instants— Cazzo! Les composants! —Et se souvient-il de la raison propre de sa venue ici.
En un effort de se relever, maladroitement, il envoya son pied directement dans le ventre du canard défait, murmurant un scusa! avant de se redresser avec toute la grâce d'un nouveau-né, il chercha des yeux les pièces pour l'ordinateur de Svane. Les trouvant tombés un peu plus loin, il se précipita dessus, mine toute inquiète. Visiblement sans dégât, il laissa sortir un soupir inutile, avant d'envoyer une mine penaude vers Svane,
— Désolé... Il semblerait que j'ai deux pieds gauches, blagua-t-il, encore un peu gêné de son spectacle mettant en vedette toute son absence de grâce. Les composants sont sains et saufs par contre!, informa-t-il Svane : au moins il y avait ça.
Remarquant subitement la position de son ami, il s'approcha et se pencha au-dessus de lui, un peu inquiet :
— Ça va Svane?, il fixa autours de lui, T'es tombé ou tu relaxes sur le sol?
Visiblement, Nikolas ne s'était pas aperçu —ou ne se souvenait-il tout simplement pas de la course frénétique du canard?— que Svane l'avait sauvé de nouvelles craques dans son squelette.
— J'ai jamais fait, mais ça doit être cool!

Notant, puis oubliant, la respiration fatiguée de Svane, Niko continuait de regarder, curieux, le plus vieux conte devant lui.
— Tu devrais me rejoindre., il lui envoya un regard ahuri, incapable de capter la subtilité ironique du message, C'est cool le sol. C'est plat, c'est froid, c'est dur. Ça tombe pas des escabeaux pour m'aplatir un peu plus., il écarquilla des yeux avant de laisser à nouveau un petit rire s'échapper de ses lèvres, libre de tout glitch cette fois.
— Please, wait que je sois parti avant de refaire une autre cascade de ce genre.
Se grattant le derrière de la nuque en un air un peu penaud et honteux, il sourit à Svane, un oeil fermé en une expression amusée.
— Je promet rien, mon équilibre n'est plus ce qu'il a été depuis...,  son regard erra un moment vers l'invisible, vers le passé oublié—
— Mais on était ici pour ton ordinateur!
—Et rapidement le moment disparu, remplacé par une expression habituelle sur le visage de l'androïde.

Se dirigeant vers l'avant-boutique, il revint vers l'ordinateur de Svane tout en fredonnant une vieille comptine italienne dont le nom lui échappait. Sortant un tournevis du compartiment dans son bras, il se mit à la tâche d'ouvrir le panneau de l'engin, musique toujours sous son souffle. Une scène peu inconnue à Svane, qui avait déjà entendu cette musique mainte fois couplée avec la concentration de Nikolas sur une tâche, malgré que la véritable origine de la mélodie échappait désormais à son compère.
Une autre chose qu'effectuait Nikolas sans véritable s'en rendre compte, comme si son corps et instinct se rappelaient de chose que son psyché avait perdu.

Il replaça sa loupe oculaire et, en quelques instants, l'habile ingénieur avait retiré les composants fautifs et était en train de recréer les connections à l'aide d'un fer à souder et de la soudure tenue par son autre main. La fumée s'élevant autours de sa tête, il gardait toutefois son attention sur sa tâche, esprit totalement absorbé et inconscient de son entourage.

Sifflotant l'air vibrant de la chanson inconnue, Nikolas continuait de réparer l'ordinateur de Svane. Tarentelle dansante résumée en quelques sifflement et vibrations de la gorge, il sautillait doucement sur ses pieds au rythme d'une danse oubliée.
— Finito!
Présentant son oeuvre aux yeux de son client, il offrit un gros sourire à Svane, fier de son accomplissement.
— J'ai modifié un peu quelques circuits et j'ai installé un fusible afin que le circuit ne reprenne pas feu si ton électricité continue d'être aussi agaçante, il pointa les différents composants en les présentant, Si jamais le fusible s'actionnait, tu n'as qu'à revenir ici et je le remplace gratuito!, ce n'était pas le genre de personne qui offrait des services pour l'argent, mais bien pour le plaisir de se sentir utile et pratiquer son loisir, Quant aux autres composants, ils devraient pas causer plus de problèmes, mais sait-on jamais, fait moi signe dès que y'a un petit soucis.
Il effectua de nouveau un rapide diagnostic des circuits puis, satisfait des résultats, referma le capot et retourna l'engin vers Svane.
— Quant au prix, sérieusement, te préoccupe pas pour ça, avoir trouvé quelqu'un qui le connaissait positivement Avant suffisait à le rémunérer amplement. Toutefois, son ventre grogna audiblement exactement aux même instants et une mine penaude s'installa sur le visage de Nikolas.
— Ou tu pourrais me payer à manger! Oui, c'est une bonne idée ça, ignorant le fait qu'il n'avait pas mangé depuis quelques jours. Son corps ne requérait pas d'alimentation journalière, mais même lui devait manger par moment.

Mine un peu timide d'être contredit, Nikolas amena une main sur son collet, un sourire et rire accompagnant ses yeux fermés sous la gêne de "forcer" son ami à payer.
— C'est perfecto mon ami. Je ne pouvais pas rêver pour mon précieux outil de travail.
Et la gêne d'être ainsi complimenté pour une chose qu'il considérait comme "facile" et "de routine".
— Of course que je t'emmène manger ET que je te paie pour tes services., Nikolas alla pour ouvrir sa bouche— Et y'a pas de "mais" !— Puis s'interrompit avec un "clack" audible de sa mandibule se refermant. Et y'a pas de "mais" ! Aller je t'embarque !
Fixant, un peu ridicule avec son regard se croisant afin de regarder devant lui, la main tendue, un peu surpris qu'on lui demande son avis, un sourire s'éclaira sur son minois et il ôta rapidement son tablier puis le posa sur la table à ses côtés.
— Ok!
Était-ce un peu inquiétant la facilité qu'avait Nikolas a suivre de parfait inconnu sur leur parole unique qu'ils se connaissaient avant son amnésie? Prêt à suivre n'importe qui avec un joli sourire et de belles paroles?

Oui.
Certes.

Et n'est-ce pas ce qui l'avait mit dans le pétrin la première fois?
Pas qu'il s'en rappelait, vrai.

Retirant ses lunettes, il les accrocha à un crochet débordant proche de la porte et attrapa un vieux gilet à moitié décousu, prêt à suivre Svane hors de sa boutique et où il le mènerait.

Encore.
Très naïf et confiant.

Fermant derrière lui la porte de la boutique et, prenant bien soin de la fermer à clé —Pas la première fois qu'il l'oubliait, et malgré qu'il appréciait les ratons laveurs, moins ceux qui grommelaient du fait qu'il n'y avait pas de café colombien dans les armoires—, il se retourna vers Svane afin d'attendre qu'il mène la danse vers le restaurant désigné.
— J'ai trouvé un petit resto italien pas loin, si ça te tente ? Sinon je peux toujours te trainer jusqu'au quartier du bien pour un de ces riche palace pompeux mais entre nous, la cuisine gastro c'est pas terrible. Et on pourra discuter plus librement comme ça aussi, sans que tous le monde nous regarde comme des bouseux.
Hochant de la tête, très peu capricieux dans tout ce qui concernait nourriture et gastronomie, il se contentait de suivre les goûts de celui qui allait payer —Pas qu'il avait amené son porte-feuille non plus, sagement oublié sur la table de travail—.
— Ou alors si tu as d'autre préférence ? De mémoire tu aimais bien la nourriture italienne mais hésite pas à me dire si tu as envie d'autre chose ?
Nikolas fixa la main tendit une seconde, avant de l'attraper des siennes, bondissant comme un jeune enfant uniquement content de croiser un ami,
— J'ai pas de préférence, donc ce que tu choisis me va!
Et si Svane disait qu'il avait autrefois apprécié la nourriture italienne, alors il s'en remettait à sa meilleure mémoire. Il était juste réjoui de pouvoir passer un peu de temps en sa compagnie, malgré que cela ne faisait que quelques heures qu'ils se connaissaient — ou du moins, dans cette vie.

Le voyage fut vint, mais rempli. Nikolas envoyait des regards un peu partout, curieux de tout et rien. Le quartier n'était pas quelque chose d'inconnu dans sa vie, mais avec une mémoire aussi défaillante que la sienne, chaque fois qu'il arpentait les rues c'était comme s'il les redécouvrait un peu. Il y avait toujours des nouveautés ici et là : Des nouvelles personnes, des nouveaux magasins, des nouveautés dans les boutiques, des offres, des activités—

Oh.
Ils étaient là.

Pénétrant à la suite de Svane dans le petit restaurant, il scannait les environs, yeux ne sachant pas quoi regarder en premier.
— Prend tout ce qui te fait envie.
Tournant la tête vers le canard, il attrapa la carte offerte et l'observa,
— Et t'inquiète pas pour le prix, tes réparations te garantissent encore un repas ou deux à mes frais.
Il le regarda, un peu inquiet : vraiment? Il ne voulait pas ruiner Svane après tout...
Puttanesca, Aranciata, Pizza, Lasagne, Pates, il y avait du plus classique jusqu'à quelques plats plus "traditionnels". Il observait le menu, un peu perdu quant à son choix de nourriture, quand un.e serveur.se vint les saluer.
— Bonjour! Que puis-je vous servir?
Il releva la tête, subitement un peu nerveux,
— Oh! Euh... Non, pas un café, la dernière fois qu'il en avait pris ça c'était mal fini... Il ne servait pas d'huile ici... De l'eau? Non, ses circuits grinçaient des jours durant après...
Il adressa un regard à Svane, le "Aide-moi" assez clair sur son visage.

Nikolas souffla un petit coup lorsqu'il vit le signe de Svane, soulagé qu'il était venu à son secours.
— Un coca. Et... Vous avez des bouteilles d'huile ? Genre huile d'olive ? Huile piquante pour pizza ? Même huile de friture ? On en prendra tout ce que vous avez avec le mot "huile" dedans.
Niko leva la tête subitement, surpris des mots sortant de la bouche de son ami. De l'huile?? Oh mais... Maintenant qu'il y pensait... Ça avait l'air bon... Et ses circuits grinçaient depuis quelques jours...
— Oh! Oh! Vous avez l'huile avec les petits morceaux dedans, les graines de Piments? Et vous avez des Piadina? Merciii!
Et ainsi reparti leur serveur, tout aussi perplexe que blasé par son expérience dans le quartier.
— J'aurai dû demander de l'huile de moteur aussi, mais chui pas sûr qu'ils aient ça ici., il haussa des épaules. L'huile de moteur avait tendance à avoir un goût âcre et amer en bouche, Nikolas préférait de l'huile plus fine, Je ne me rappelle plus exactement quel genre d'huile tu préférais à l'époque. Et la seule fois où j'ai tenté de boire avec toi j'ai finit aliter pendant toute une semaine.
À la mention de "l'époque", il ramena ses mains sous la table et sur ses genoux, jouant avec une jointure mal alignée dans ses phalanges. Il ne voulait pas trop le décevoir en lui rappelant qu'il n'avait aucune mémoire de cette "époque" et qu'il avait très sûrement beaucoup changé depuis. Il se contenta alors de ne rien dire.

Lorsque les pains et huiles arrivèrent, la gêne de Nikolas s'envola en un redressement alors qu'il zieutait la nourriture comme s'il n'avait jamais rien ingéré de plus alléchant dans sa vie. Il remercia le serveur d'un "grazie", puis attrapa un pain et une bouteille et fit connaitre la première douche d'huile au pauvre petit flatbread. Il enfourna tout le petit pain dans sa bouche et se délecta de l'explosion huileuse ainsi que du petit piquant sur ses capteurs face à la capsaïcine.
— Merci Svaaane!!, dit-il la bouche pleine, manières jetées par la fenêtre et oubliées avec sa banque de mémoire.