— petits pas sur les pavés qui font un bruit dansant et régulier et tu zigzagues entre les passants comme si tout cela t'étais familier {et rien n'est moins vrai} comme si tu ignorais l'angoisse la peur, que le monde t'appartenais. C'est que tu n'as pas de temps à perdre en inquiétude et en film d'horreur quand tu circules entre ces individus sortis d'on ne sait quelques histoire sordide, conte à frisson et destin cruels — puis si ils sont là, c'est qu'ils souhaitaient autre chose, et grand bien leur face. Et si ils ne sont motivés que par un égoïsme désespéré, franchement, qui es-tu pour juger ?

Toi-même cela va faire une dizaine de jours que tu t'es échappé – après, si l'on t'écoutes, avoir mené ton destin à terme {donc tu n'es pas comme eux} ; après avoir réduit en cendre ce que des générations de tête couronnées s'étaient appliqué à construire, après des adieux {brûlants} {déchirés} {déchirants}, après avoir  —  tourné la page vers un nouvel épilogue, un que personne n'a jamais lu ou écrit avant.

Si t'es si sûr de toi, si persuadé d'être intouchable et que rien ne te rattraperas, alors pourquoi tu t'efforces de faire disparaître toute trace du passé ? Tu diras que c'est parce qu'il a mauvais goût {quelque chose entre métal et caramel brûlé} que ça te va mal au teint et que les vrais recommencement ne se font que quand il ne reste vraiment plus rien. Pour un rossignol t'es vraiment pas loin de te prendre pour un phénix. Et ton nouveau départ {nouveau corps nouvelle tête nouveau monde} il est presque sans faille — si ce n'était cet embarrassant souvenir si reconnaissable.

Tu l'aimes pourtant, tu les aimes, {tes ailes} ou tu les as aimé. Les émotions sont un peu plus complexes à cerner maintenant que tu as une certaines liberté. Avant, c'était si simple — et maintenant franchement les choses ont des nuances et tu trouves ça nul. Quelle horreur que de devoir essayer de penser pour comprendre ce que l'on ressent, et qu'on te rende la légèreté d'être bête !! Alors tu joues l'idiot insouciant, et avec un peu de chance, tu te prendras au rôle.

Tu as demandé à ton enchanteresse si elle ne pouvait pas faire disparaître tes ailes — les revendre, les ensorceler, grand bien lui fasse tant qu'elle en fasse quelque chose. Mais la mécanique les rouages et le travail d'orfèvre horloger la laisse de marbre. À la place elle t'a indiqué où aller — et te voilà, devant la devanture du truc, sans trop savoir à quoi t'attendre. C'est qu'en même temps ce monde il est quasi nouveau pour toi, et on ne peut pas demander à un nouveau-né de savoir de quoi les choses sont supposées avoir l'air.

Alors tu te glisses dans l'étrange bric-à-brac, faisant tinter la cloche de la porte d'entrée. Si c'est ouvert au moins, c'est qu'il doit y avoir quelqu'un.

Grands yeux affamés qui se posent sur un monde de curiosité – tu t’es faufilé dans la boutique et s’il n’y a personne là devant toi les bruits d’abords discrets que tu entends en arrière te rassurent quant à la présence d’un quelqu’un. Tu en profiterais bien pour découvrir plus en détail ce qui t’entoure, te pencher sur la ferraille – créatures fascinantes de vis et de boulon, univers tout nouveau qui s’offre à toi, mais.

— Cling clang clong. Bang ! Dans le fracas qui s'ensuit on pourrait croire que ce qui va sortir du ventre de la boutique c'est un géant de fer – un monstre imposant, un créature de l’enfer. Tu t’éloignes aussi vite que tu t'étais approché, de surprise, comme si c’était toi et ce que tu observais qui avait causé ce vacarme; alors que non, tu n’as touché à rien. Presque par réflexe tu te prépares au pire {après tout tu ne sais rien de l’endroit où on t’as envoyé}, peut-être une créature de la taille d'un immeuble - quand bien même le plafond ne lui laisserait pas la place.

Alors le personnage qui apparaît, ça n’est pas exactement ce à quoi tu te préparais. Un peu plus grand que toi mais pas vraiment menaçant – l’inverse même, et tu lèves les yeux vers son visage souriant et tu ne peux que imaginer le chaos derrière si c’est bien lui la source du bruit. Des ruines d'une guerre contre l'ordre avec une armée de petits soldats de plombs de fer et d'acier, il faut croire.

et à son accueil ton bonjour!! [quoique silencieux] et ton expressions matche la sienne, posant un regard curieux sur sa personne – tu n'as pas encore vu assez d'individus pour pouvoir vraiment dire que tu n'as  jamais vu personne comme lui mais ! Tu peux au moins constater qu'il ne ressemble pas aux gens que tu as vu jusque là.

les échos du bruit se font encore entendre - peut-être même juste là, le crash de quelque chose derrière ses portes qu'il vient de passer. Un fracas de chose qui n'aurais sûrement pas du rencontrer le sol aussi brutalement. « Tout va bien ? » tu signes – encore surpris par le bruit. Machinalement tu te rappelles que jusque-là [un jusque-là plutôt court, reconnaissons-le] signer est rarement compris par tes interlocuteurs. T’aurais un téléphone tu aurais développé le réflexe de proposer les deux options – signer ou écrire. Un instant tu hésites, poses les yeux sur lui, évalue la réaction – et surtout, la compréhension.  « J'entends sans problème, je n'ai juste pas de voix. » tu expliques rapidement, voir si son oeil s'allume comme celui de quelqu'un qui comprends – mais aussi que si c'est le cas, qu'il n'a pas besoin de signer en retour.

Au besoin tu dois bien avoir un stylo sur toi, de quoi traduire tes mots sur du papier. Ou euh. Tu as le stylo, très certainement. Mais tu ne te rappelle pas avoir embarqué la feuille sur laquelle il est pratique d'écrire.

Alors, oui, il peut t'aider – tu espères. Mais une chose à la fois.

(en espérant que l'arrière-boutique ne s'effondre pas sur vous)